Histoire de la Chine


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La prehistoire, la dynastie Xia et la dynastie Shang-Yin

 

La Chine se considere comme le centre du monde. L'occident, avec ses deux ailes, l'europeene et la nord-americaine, se pensait responsable de ce monde et se conduisait en consequence. Peu de civilisations ont echappe a l'autocentrisme: ce qui est durable et puissant a toujours recherche la domination universelle. Nous comprendrons donc la pretention chinoise a etre le Pays du Milieu (Zhongguo).

La Prehistoire:

Des les ages prehistoriques, les premieres manifestations humaines apparurent extremement diversifiees. Durant une quarantaine d'annees, le fossile humain le plus ancien demeura celui decouvert en 1921 dans la colline de Tcheou-k'eou-tien, pres de Pekin (Beijing). En 1927, D.Black l'attribua a un ancetre de l'homme chinois qu'il nomma Sinanthropus pekinensis, "sinanthrope de Pekin", ou, plus couramment, "l'homme de Pekin". L'homme de Pekin et son "ancien", l'homme de Lantian, ont plus de 500 000 ans d'existence.

A l'epoque neolithique, la Chine, comme tous les autres pays, fut le theatre de grands bouleversements: naissance et developpement des cultures agricoles, sedentarisation de la population, regroupement des habitants en agglomerations d'importance croissante, polissage des pierre servant d'outils, poteries, organisation des taches economiques et sociales, elaboration de conceptions religieuses. L'un des sites les plus celebres, qui a donne son nom a une culture, est celui de Yangshao, sur le fleuve Jaune (Huanghe). Au confluent du fleuve Jaune et de la riviere Wei se sont montees, par le travail naturel des eaux, les couches de loess, d'une exceptionnelle fertilite. Ce nom "fleuve Jaune" lui vient de la couleur qu'il prend en charriant ces enormes quantites de loess. Le loess se depose en alluvions, ce qui cree l'etonnant spectacle d'un fleuve qui souvent coule au-dessus de sa propre plaine. On comprend que les inondations, quand se rompent les digues, submergent la plaine: les gens perissent par centaine de mille.

La dynastie des Xia: (2207 - 1766 Av.J.C. ou 2207 - 1558 Av.J.C.)

Selon la legende, une succession de trois souverains et de cinq empereurs precederent les Xia. On represente generalement le premier des trois souverains, Fuxi, avec sa femme, qui etait aussi sa soeur, la deesse Nugua. Tous deux possedent un buste humain et une queue de dragon. On attribue a Nugua la creation de l'espece humaine a partir d'argile et l'institution du mariage, tandis que Fuxi aurait appris aux chinois la chasse, la peche, et l'elevage. Divinite a tete de boeuf, Shennong leur aurait pour sa part enseigne l'agriculture et la connaissance des proprietes des plantes medicinales.

De meme, on impute aux cinq empereurs l'apport de certains elements cles de la culture chinoise. Le premier d'entre eux, Huang Di, aurait donne au peuple chinois le calendrier des recoltes, les bateaux, les armures et la poterie. Un empereur plus tardif, Shun, inventa le pinceau a calligraphier. C'est avec son abdication en faveur de Yu, le premier empereur Xia, que s'amorca le regne dynastique.

Selon de nombreux historiens, la dynastie Xia a reellement existe, mais pas sous la forme decrite par la mythologie chinoise. Cette dynastie serait restee au pouvoir pendant pres de cinq siecles, jusqu'au milieu du XVIII siecle av. J.C., avant de sombrer dans la corruption et d'etre renversee par les Shang.

 

La dynastie des Shang-Yin: (1766 -1122 Av.J.C. ou 1558 - 1050 Av.J.C.)

La deuxieme dynastie, Shang-Yin, a une histoire legendaire plus fournie; des decouvertes archeologiques (listes de souverains par exemple) confirment pratiquement les reperes historiques qui soutiennent les recits. Le site le plus prestigieux est celui d'Anyang, capitale du XIV au XIeme siecle av.J.C., dans la partie Nord-Est du Henan. On a retrouve quantite de bronzes (vases, urnes,...) d'une technique d'alliage et du coulage si parfaite que l'on a nomme cette epoque la civilisation du bronze. Les ruines ont montre des villages constitues avec des enceintes, ce qui suppose une predominance de l'agriculture. On a pu reconstituer deux groupes: les nobles (clientele et parente du souverain) et les roturiers (agriculteurs, eleveurs, artisans). La dynastie des Shang-Yin voit les debuts de l'ecriture; en temoignent les milliers de fragments d'inscriptions divinatoires sur des omoplates de boeuf ou des ecailles de tortues geantes, les jiaguwen, receuillis depuis le debut du siecle. les tombes attestent deja le culte des ancetres. la chute des Shang-Yin, comme celle de toutes les dynasties qui devaient lui succeder, ne fut pas concue comme l'effet de hasards malheureux: Les Chinois virent toujours dans ces revers du sort la juste punition d'une decheance. L'antique lignee avait perdu son efficacite et n'assurait plus le lien du groupe avec l'univers.

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La dynastie Zhou, la dynastie Qin, la dynastie Han et les barbares (1122 - 589 Ap.J.C.)

 

La dynastie Zhou: (1122 - 221 Av.J.C.)

La capitale Zhou connu sous le nom de Hao, etait situe a proximite de Changan (aujourd'hui Xian), qui allait devenir le siege du pouvoir imperial sous de nombreuses dynasties. Les Zhou possedaient un autre centre de pouvoir proche de la ville actuelle de Luoyang, dans le Henan, d'ou ils gouvernaient les Shang qu'ils avaient assujettis. Leur structure sociale fut semble-t-il, profondement influencee par celle des Shang, dont ils avaient herite les pratiques divinatoires et le culte des ancetres. En regle generale, les historiens divisent l'epoque Zhou en deux periodes; celle des Zhou occidentaux (1221 - 771 av. J.C.) et celle des Zhou orientaux (770 - 221 av.J.C.).

Les Zhou occidentaux: Les Zhou, originaires de la Chine de l'Ouest, dissemines a travers la Grande Plaine, ne dedaignerent pas les territoires situes sur leur flanc ouest ou des populations, plus proches du neolithique, continuaient a vivre de chasse et de peche. Les legendes abondent qui rapportent les merveilles et les dangers fabuleux dont leur imagination parait ces pays encore sauvages : ainsi le conte des "Quatre loups blancs et des quatre cerfs blancs", ou bien celui de la "Mere, reine de l'Occident", deesse des epidemies commandant aux demons de la peste. lls soulignent l'interet mele de crainte que les sedentaires portaient a ces contrees dont dependait la quietude du monde civilise. L'economie de ces regions evoluait et c'est precisement dans les territoires occidentaux de l'Asie que se developpa, aux environs du premier millenaire avant notre ere, la monte du cheval qui allait bouleverser la tactique militaire tant barbare que chinoise et rendre encore plus menacantes les attaques barbares. Ces barbares representaient un danger bien reel, a la fois exterieur et interieur, car leur appui favorisa le coup de main des grands seigneurs qui, en 771 avant J.-C., deposerent et tuerent le roi Yeou, dernier des Zhou installe dans L'Ouest chinois. L'importance du bouleversement apparait d'autant plus grande que les recentes fouilles ont davantage mis en evidence la prosperite et la richesse des cites de l'epoque. Si les habitations n'avaient guere change dans leur conception generale depuis les Shang-Yin, elles etaient en revanche couvertes de toits de tuiles dont l'emploi semble alors s'etre instaure et rapidement repandu. On connaissait aussi l'usage du puits a eau que les Zhou innoverent en Extreme-Orient.

Les Zhou orientaux: En quittant la vallee de la Wei, le roi Zhou croyait peut-etre se refugier en terre amie, dans la Grande Plaine ou prosperait les descendants des compagnons d'armes de ses ancetres et la lointaine progeniture de ses aieux. Mais il trouva en face de lui une multitude de seigneurs jaloux de leur autonomie et qui n'invoquaient leurs liens avec les Zhou que pour mieux tenir en mains le peuple. Les cousins se partageaient le bassin inferieur du fleuve jaune ou grandissaient ces multiples cellules qui tendaient a l'autonomie. Mais, l'age de bronze touchait a sa fin et avec lui les craintes secretes des civilisations qui voient disparaitre leurs sources d'energie. Au VIeme siecle avant notre ere, une large exploitation du procede de la fonte du fer allait permettre en meme temps qu'une multiplication de l'armement et des outils de qualite, bien des bouleversements materiels ou sociaux.

La traditionnelle subdivisiion de leur regne entre periode des Printemps et Automnes (722-481 avant J.-C.) et periode des Royaumes combattants (453-221 avant J.-C.) ne correspond pas a une logique historique. Elle fait davantage reference aux periodes que couvrent deux ouvrages historiques du meme nom et contemporains de cette epoque, qui furent a la base du systeme educatif classique jusqu'a la chute des Qing en 1912. Les Annales des Printemps et Automnes sont generalement attributes a Confucius (551-479 avant J.-C.), un erudit qui erra de royaume en royaume a la recherche du gouvernant capable d'appliquer ses conceptions de l'Etat ideal. Le confucianisme ne fut pas le seul courant de pensee important a emerger pendant le regne des Zhou orientaux. C'est egalement pendant cette periode que Laozi (Lao Tseu) ecrivit son Daode Jing, ou Le Livre de la Voie et de la Vertu, le texte fondateur du taoisme. Bien d'autres ideologies se developperent sous les Zhou orientaux (les Chinois font d'ailleurs frequemment allusion aux "Cent Ecoles"). Toutefois, le taoisme et le confucianisme sont les deux courants qui marquerent le plus profondement la pensee chinoise, le premier par son caractere pragmatique et social, le second par son cote plus personnel et mystique.

Le mandat du Ciel: La periode Zhou fut cruciale. En tout premier lieu, la notion de "mandat du Ciel", selon laquelle le Ciel confie la charge de gouverner aux dirigeants sages et vertueux et la retire a ceux qui sont mauvais et corrompus. Ce concept fut par la suite elargi afin d'integrer la theorie taoiste selon laquelle les desastres naturels sont l'expression de la desapprobation du Ciel a l'encontre des mauvais gouvernants. Dans le meme ordre d'idees, le Ciel est cense exprimer son mecontentement a l'egard des dirigeants corrompus par la rebellion et le retrait du soutien des gouvernes. On fit reference a ce propos de, "droit a la rebellion", concept embarrassant dans la mesure ou ce droit ne pouvait etre confirme que par, le succes. Neanmoins, les manifestations de la volonte du Ciel sous forme de rebellion constituaient un ingredient essentiel du cycle des dynasties chinoises, a la difference du Japon ou l'autorite de la famille imperiale derive d'une seule lignee qui, selon la legende, remonte a la deesse du Soleil.

La dynastie Qin: (221 - 206 av.J.C.)

Le fragile pouvoir dont jouissaient les Zhou prit fin au IIIe, siecle avant J.-C., lorsque l'Etat de Qin reussit pour la premiere fois a unifier la Chine. L'Etat de Qin accrut son pouvoir au cours des Ve et IVe siecles av. J.-C. En 246 avant J.-C., il conquit le Sichuan actuel et fit de meme avec les autres royaumes qui se trouvaient sur son chemin. En 221 avant J.-C., le royaume de Qin l'ayant emporte sur tous les autres, Qin Shihuang prit le parti de reunir ses conquetes au sein d'un seul et meme empire. Il s'attribua alors le titre de huangdi, "empereur". La dynastie Qin legua a la Chine un systeme administratif fortement centralise et imposa une division du territoire en provinces, gerees par des fonctionnaires nommes par le pouvoir central. Les poids et les mesures furent egalement normalises, ainsi que la langue ecrite. Enfin, on entreprit la construction de la Grande Muraille, qui fut essentiellement l'oeuvre de conscrits, dont on ignore combien perirent pendant les travaux. L'heritier de Qin Shihuang sur le trone imperial se revela incompetent. Secouee par la rebellion, la capitale Qin, proche de l'actuelle Xian tomba aux mains d'une armee d'insurges en 207 avant J.C. Leur chef, Liu Bang, prit le titre d'empereur et fonda la dynastie Han.

La dynastie Han: (206 - 220 ap.J.C.)

Les Han profiterent des acquis et du travail des Qin; ils garderent la structure de l'Etat et le systeme administratif mis en place: les fonctionnaires furent pratiquement tous des lettres confuceens. un systeme des Examens permettait de controler et de former les candidats dans la doctrine officielle. Remanie plusieurs fois, le systeme demeurera cependant une constante du recrutement administratif. Les postes furent parfois achetes ou donnes aux fils de familles; subsistait la possibilite, plus ou moins reelles suivant les epoques, de parvenir a des grades, meme eleves, de la hierarchie, par les etapes successives des examens locaux, provinciaux, nationaux. Le programme d'etude sera toujours fonde sur la connaissance exhaustive des livres Classiques: morale, histoire, litterature, poesie, langue. la stagnation des sciences et techniques ainsi que de l'art de l'administration bloquera peu a peu l'evolution du corps des "mandarins', une appelation aujourd'hui desuete. ils ne surent empecher l'affaiblissement la decentralisation du pouvoir qui se solda par l'abdication du dernier empereur Han en 220 et le debut de quatre siecles de troubles.

Les barbares:

L'expansion des Han fit entrer les Chinois en contact avec les "barbares" qui environnaient leur territoire. Il en decoula des conflits militaires et des retombees commerciales. Au nord, les Xiongnu (nom donne a diverses tribu nomades d'Asie centrale) representaient la menace la plus serieuse pour la Chine. Les premieres expeditions militaires lancees contre elles furent un succes. Elles donnerent aux Chinois acces a l'Asie centrale, en leur ouvrant la route qui leur permit de faire parvenir leurs soies jusqu'a Rome. Selon les historiens chinois, cette periode correspond aux regnes des dynasties Wei, Jin, et des dynasties du Nord et du Sud. En realite, dix-neuf royaumes et bastions rivaliserent pour se maintenir au pouvoir entre 316 et 439. Au debut, le pays se divisait en trois grands royaumes : celui des Wei qui s'etendait peu ou prou sur toute la region au nord du Chang Jiang (Yangzi Jiang, ancien Yang-Tse-Kiang ou fleuve Bleu), tandis qu'au sud celui des Wu occupait l'est et celui des Shu l'ouest (le terme de Shu sert encore a designer la province du Sichuan). Les Wei (220-265) demeurerent au pouvoir un peu plus de quarante ans. Les Jin occidentaux (265-316) ne firent guere mieux. En 316, leur capitale, Luoyang, tomba aux mains des cavaliers Xiongnu. Il en resulta un siecle et demi d'effusions de sang. Au Ve siecle, le nord fut divise entre Wei orientaux et Wei occidentaux. En 577, les Wei occidentaux defirent les Wei orientaux et, en 581, l'un de leurs generaux s'empara du pouvoir et fonda la dynastie Sui. En 589, les Sui avaient pris le controle du sud de la Chine, et le pays se retrouva unifie sous une seule autorite.

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La dynastie Sui, la dynastie Tang, la dynastie Song, la dynastie Yuan et la dynastie Ming (589 - 1644)

 

La dynastie Sui: (589 - 618)

A la fin du VIe siecle, un general unifie la Chine et fonde la dynastie des Sui dont la destinee evoque celle de la dynastie des Qin (221 - 207 av.J.C.): meme conquete guerriere, meme poigne d'autocrates intransigeants, gigantesques travaux d'amenagements de la Grande Muraille et des grands canaux qui relient le Nord au Sud, meme fin rapide et tragique pour laisser la place la dynastie Tang, generalement consideree par les Chinois comme la periode la plus glorieuse de leur histoire.

La dynastie Tang: (618 - 907)

La prise du pouvoir par Gaozu (618 - 626) ne s'effectua pas sans heurts. Les Tang etablirent une administration pyramidale chapeautee par l'empereur avec, sous ses ordres, deux ministres charges des affaires politiques, l'equivalent d'un ministre de l'interieur, neuf cours et six ministeres charges de regions administratives specifiques. Pour decourager le developpement de pouvoirs regionaux, l'empire fut divisie en 300 prefectures (zhou) et 1 500 districts (xian), un decoupage qui subsiste aujourd'hui. Le regne du fils de Gaozu, Taizong (626-649) vit se poursuivre les succes. Les conquetes,militaires autoriserent le retablissement du controle chinois sur les routes de la soie et contribuerent a un afflux de marchands. Il en resulta une "internationalisation" sans precedent de la societe chinoise. Les principales villes de Chang'an, Luoyang et Guangzhou (autre fois appelee Canton), ainsi que bien d'autres cites marchandes, accueillirent des communautes etrangeres. Originaires pour la plupart d'Asie centrale, ces dernieres introduisirent de nouvelles religions ainsi que d'autres traditions culinaires, musicales et artistiques. Par la suite, la dynastie Tang developpa ses contacts etrangers avec la Perse, l'Inde, la Malaisie, l'Indonesie et le Japon. Au IXe siecle, la population etrangere de la ville de Guangzhou (Canton) etait estimee a cent mille personnes. La dynastie Tang constitue aussi l 'Age d'or du bouddhisme. Des pelerins chinois, notamment le celebre moine errant Xuan Zang, se rendirent en Inde d'ou ils rapporterent des copies de textes bouddhiques, lesquelles contribuerent a leur tour au renouveau de cette religion. La traduction des textes s'etait jusque-la contentee de siniser les difficultees conceptuelles de la pensee bouddhiste. Elle fut cette fois soumise a une plus grande rigueur. Les textes bouddhiques traduits en chinois furent de plus en plus nombreux. Un schisme dans la foi bouddhique s'ensuivit. En reaction a la complexite de nombreux textes bouddhiques traduits du sanscrit, l'ecole chan (plus connue sous son nom japonais de zen), vit le jour. Le chan visait a eliminer les complexites de l'etude de l'ecriture par la discipline et la meditation alors qu'une autre tendance bouddhiste, l'ecole de la "Terre pure" (qui deviendrait la forme la plus importante de bouddhisme chinois) cherchait a atteindre le "paradis de l'Ouest". La periode la plus prestigieuse de la dynastie Tang fut, pour les Chinois, le regne de Xuanzong (712-756), egalement connu sous le nom de Minghuang ou Empereur Rayonnant. Avec une population de plus d'un million d'habitants, sa capitale, Chang'an, etait l'une des plus grandes villes du monde. Sa cour attirait des savants et des artistes venus, de tout le pays et accueillit quelque temps Du Fu et Li Dai, probablement les deux plus celebres poetes de Chine. Son regne fut caracterise par un epanouissement des arts, de la danse et de la musique ainsi que par une extraordinaire diversite religieuse. Pour certains, toutefois, toutes ces activites artistiques ne pouvaient etre que le signe d'un certain amollissement au coeur de l'empire. L'interet croissant de Xuanzong pour les arts, pour le bouddhisme tantrique, pour le taoisme, pour l'une de ses concubines, Yang Guifei, et pour tout ce qui captivait son imagination, le detournait de la gestion de l'Etat, confiee a ses administrateurs. An Lushun, un general en poste au Nord-Est, en profita pour renforcer son pouvoir dans cette region et partit a la conquete du reste de la Chine en 755. Les affrontements, qui durerent pres de dix ans, se solderent par la destruction de la capitale et des deplacements de population massifs et firent des millions de victimes. Les Tang reussirent a reprendre la maitrise de l'empire, mais la fin de leur dynastie etait proche. Aux VIIIe et IXe siecles, le pouvoir des Tang ne cessa de s'affaiblir. La rebellion endemique amene leur chute en 907.

De 907 a 960, jusqu'a l'arrivee de la dynastie des Song, la Chine fut a nouveau ravagee par les guerres entre les differents pretendants au mandat du ciel. On fait communement reference a cette epoque sous le nom de periode des Cinq Dynasties et des Dix Royaumes.

La dynastie Song: (960 - 1279)

La periode Song se divise generalement entre Song du Nord (960-1126) et Song du Sud (1127-1279). La raison de cette division tient a la dynastie Jurchen des Jin, qui prit le controle du Nord en 1126 et obligea les Song a deplacer leur capitale de Kaifeng a Hangzhou, dans le Sud. Malgre la menace continuelle representee par d'importantes armees aux frontieres (le royaume tibetain/tangut de Xia, la dynastie Kitan des Liao et la dynastie Jurchen des Jin), les Song se sont illustres par une forte centralisation politique, un renouveau de l'erudition confuceenne, un retour au systeme des examens qui favoriserent l'essor d'une bureaucratie dominee par les civils et une revolution commerciale. L'expansion economique de la periode Song tient pour une large part aux progres considerables realises dans l'agriculture. L'exploitation de nouvelles terres, l'utilisation de varietes de riz plus productives ainsi que le perfectionnement des outils et des techniques agricoles favoriserent ce developpement. Parallelement, l'amelioration des voies de communication, l'emergence d'une classe de marchands et l'introduction du papier monnaie faciliterent le developpement de plus vastes marches. Cette revolution commerciale permit la croissance d'un plus grands nombres de centres urbains approvisionnes par un flux de denree provenant de tout le pays. Lorsque Marco Polo arriva en Chine, au XIIIe siecle, il decouvrit de tres nombreuses cites prosperes, bien plus qu'il n'avait l'habitude d'en voir en Europe. Pour les historiens, la dynastie Song marque le tournant dans le developpement d'une civilisation urbaine. En 1279, le petit fils de Gengis Khan, Kubilai Khan, s'empara de la Chine du Sud et fonda la dynastie Yuan.

La conquete Mongole ou La dynastie Yuan: (1277 - 1368)

Les maitres de la Chine sont aussi maitres a Bagdad, a Budapest, a Nvogorod. Beijing (Pekin) ou Guangzhou (Canton) ne sont que les points les plus extremes de leurs possessions. Les mouvements des tribus et les deplacements de troupes servent de conducteur pour un echange d'individus et d'idees, d'influences ou se fondent tous les arts de la vie. Sous les Yuan arrivent en Chine de petits partis de voyageurs. Les plus celebres sont des commercants venitiens, Niccole et Matteo Polo, puis le neveu Marco, qui y sejourna une vingtaine d'annees, amassant une fortune colossale, en rapportant des souvenirs eblouis. Il y aura aussi des envoyes du pape ou du roi de France Louis XI, les premiers missionnaires, frranciscains et la creation de l'archeveche de Cambalik (Beijing). les relations etaient officiellement prises avec des Mongols que les Occidentaux ne distinguaient pas des Chinois; elles s'interrompirent brutalement quand la revolte nationale chinoise chassa les Yuan. Peu de temps apres, en Europe, ce fut la Renaissance. Nombre de techniques nouvelles, telles l'imprimerie (connue en Chine sous les Song), les poudres a feu, la boussole, la monnaie de papier... autant d'elements qui bouleverserent la societe et les idees en Europe, avaient leurs ancetres a l'autre extremite du Continent. La chute des Yuan fut l'aboutissement de la reconquete de la Chine a partir du Sud, en remontant vers le Nord. En 1368, les anciennes capitales imperiales, Kaifeng, Luoyang, puis Beijing (Pekin), la capitale mongole, sont reprises et la dynastie Ming instauree.

La dynastie Ming: (1368 -1644)

L'epoque des Ming est mieux connue en Occident que bien d'autres par ses magnifiques porcelaines "bleu et blanc", vases decores de dragons, coupes a pied ornees de fins chrysanthemes Une cargaison de ces "bleu et blanc" arriva vers 1600 en Hollande ou elle fit sensation et servit de modele aux faienciers de Delft. Des ceramiques, des laques, de somptueux vetements d'apparat tisses aussi fins que les travaux de l'araignee, des peintures, forment le fonds chinois dans la plupart des musees occidentaux. Une robe de soie a ete retrouvee pres de Changsha (capitale du Hunan) dans le trousseau funeraire de la marquise de Tai. Elle pese 43 grammes. C'est cela l'art chinois : une technique qui epuise les possibilites de la matiere, l'inspiration qui recompose la nature, une subtilite, une delicatesse, la precision d'ou sortent de grands effets. Un grand ecrivain moderne et l'une des victimes de la Revolution culturelle, le romancier Lao She, le dit ainsi : "Un apprenti n'apprend pas seulement un metier : il apprend aussi la discipline. Quand il arrive dans un atelier pour la premiere fois, c'est le regne de la terreur et des brirnades. On le fait se coucher tard et se lever tot; ii doit obeir aux ordres et aux injonctions de tout le monde, se rnontrer un serviteur partaitement docile et supporter de gaiete de coeur tous les rnalheurs qui lui arrivent : la faim comme le froid, la souffrance comme la fatigue, et le tout en ravalant ses larmes... Ce qui comptait avant tout, c'etait de pouvoir tenir bon jusqu'au bout, et ca il n'y avait eu que l'apprentissage pour me l'enseigner et m'y preparer! Du point de vue professionnel, j'ai meme l'impression de n'avoir pas du tout perdu mon temps pendant les trois annees que j'ai passees comme apprenti... Nous savions reproduire avec une fidelite parfaite n'importe quoi. Par exemple, pour un enterrement, on pouvait nous demander de preparer tout un banquet, nous etions capables de confectionner en papier tous les plats correspondants, aussi bien du poulet et du canard que du poisson et de la viande. Lorsqu'il arrivait qu'une jeune fille meure dans sa famille, sans etre encore mariee, on nous demandait de faire tout un trousseau ; qu'il y est alors quarante-huit porteurs ou trente-deux, nous faisions toujours en sorte qu'il n'y manque rien, depuis le poudrier et le flacon de cosmetique jusqu'a la garde-robe et la psyche. Notre savoir-faire a nous etait de pouvoir tout copier au premier coup d'oeil. (Lao She, Histoire de ma vie, in Gens de Pekin).

L'epoque Ming est le temps des relations commerciales organisees : les Portugais arrivent en Chine dans les debuts du XVIe s. et s'installent a Macao en 1557. Une dizaine d'annees plus tard, parait en Europe le premier ouvrage consacre a la Chine des Ming. Durant ce XVIe s., les Portugais puis les Espagnols sont nombreux dans les iles des Mers du Sud (Moluques, Philippines, Java). En 1600, un jesuite, Matteo Ricci, entre a Pekin (Beijing). En 1624, les Hollandais, a Taiwan, se heurtent au celebre rebelle et pirate anti-mandchou Coxinga, mais ils dominent l'Insulinde et la Malaisie de toute leur puissance navale. Cependant, pour les Ming, l'ennemi sur mer, ce sont les pirates japonais qui pillent les cotes. Tandis que se renforce la presence des etrangers, la Chine connait une belle floraison litteraire. Essor des contes, du theatre, des grands romans : Le Voyage en Occident Xiyonji, vers 1570, le Jinpingmei (Fleur de prunier dans un vase d'or), etude de moeurs, vers 1619 (trad. Pleiade). Ils annoncent la litterature moderne. Une famine dans la province du Shaanxi et le desinteret du gouvernement mirent le feu aux poudres. Une importante rebellion paysanne precipita la fin des Ming.

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La dynastie Qing et les debuts de la Republique (1644 - 1949)

 

La Dynastie Qing: (1644 - 1911)

Profitant des troubles qui agitaient la Chine, les Mandchous lancerent une expedition. Repousses d'abord par la grande Muraille, ils parvinrent finalement a la franchir grace a la complicite d'un general Ming, qui voyait dans une alliance avec les Mandchous le seul espoir de vaincre la rebellion paysanne qui menacait Pekin (Beijing). Les Mandchous infligerent rapidement une defaite aux rebelles paysans et , en juin 1644, firent route vers la capitale Ming dont ils s'emparerent. Le regne des premiers empereurs Qing (de 1662 - 1796) fut une periode de grande prosperite. Le trone fut occupe par trois des plus grands empereurs que la Chine est connus: Kangxi, Yongcheng et Qianlong. les Qing etendirent leur empire bien au dela des frontieres, qu'il connaissait sous la dynastie Han, jusqu'a englober la Mongolie et le Tibet. Les paysans beneficierent largement de la reduction des impots ainsi que des projets de controle des inondations et du developpement de l'irrigation. L'exceptionnelle competence des trois premiers empereurs eut toutefois pour inconvienient d'entrainer une concentration du pouvoir entre leurs mains, responsabilite qu'aucun de leurs successeurs n'etaient de taille a assumer. A l'image des Mongols, , les dirigeants mandchous succomberent bientot a l'influence des Chinois. Ils se rapprocherent d'eux sur le plan culturel et calquerent leur gouvernement sur celui de la dynastie Ming. C'est ainsi que l'on retrouva chez les Qing l'isolationnisme et le conservatisme intellectuel des Ming. La Chine continua d'etre une nation repliee sur elle-meme, indifferente aux revolutions technologiques et scientifiques qui s'operaient en Europe.

La derive vers des mains etrangeres: Les puissances europeennes (Anglais, Hollandais et Espagnols) eurent acces au marche chinois, via l'installation d'une base a Guangzhou (Canton). Une association, du nom de Cohong,; detenait le monopole de toutes les operations commerciales. Elle servait egalement d'intemediaire dans les negociations entre la Chine et les etrangers afin de maintenir ces derniers a distance du centre politique, Pekin (Beijing). Le commerce fut prospere sous les auspices de Cohong, essentiellement au profit de la Chine. Les achats britanniques de the, de soieries et de porcelaines depassaient de beaucoup en valeur les achats de laine et d'epices effectues par les Chinois. En 1773, les Britanniques deciderent; d'equilibrer leur balance commerciale en vendant de l'opium. Malgre les edits imperiaux contre l'importation et l'usage de drogues, le nombre d'opiomanes ne cessa de grimper, tout comme les ventes. Apres bien des hesitations du gouvernement imperial, en mars 1839, Lin Zexu, un fonctionnaire repute pour sa grande integrite, fut envoye a Guangzhou pour mettre definitivement un terme a ce trafic illegal. Il agit rapidement et obtint la saisie de 20 000 caisses d'opium stockees a Guangzhou par les Britanniques. Les partisans de la guerre au sein du gouvernement britannique en firent un pretexte pour lancer une action militaire contre la Chine. En 1840, les forces navales britanniques se rassemblerent a Macao et remonterent la cote jusqu'a l'embouchure du Haihe (Beihe), non loin de Pekin (Beijing). La "guerre de l'Opium" avait commence. Pour les Chinois, les conflits centres sur le commerce de l'opium se solderent par un fiasco du debut a la fin. Tandis que la cour imperiale cherchait a se debarrasser des forces britanniques par un traite que les deux parties finiraient par ne pas reconnaitre, les Anglais finirent par attaquer les positions chinoises a proximite de Guangzhou. Il en resulta un traite qui concedait aux Britanniques la ville de Hong Kong, six millions de yuan d'indemnites et la totale reprise du commerce. Furieux, l'empereur Qing refusa de reconnaitre cet accord et, en 1841, les troupes britanniques firent a nouveau voile le long de la cote pour s'emparer du Fujian et de l'est du Zhejiang. Ils s'y installerent pour passer l'hiver et, au printemps de 1842, apres avoir recu des renforts de troupes, ils remonterent le Yangzi. Lorsqu'ils virent les canons britanniques braques vers Nanjing, les Qing renoncerent a combattre et signerent a contrecoeur l'humiliant traite de Nankin.

Les Taiping: De 1851 a 1864, Hong Xiuquan, prechant une ere nouvelle et la revolution contre les Mandchous, va reussir a se maintenir dans toute la Chine centrale. La repression fera vingt millions de morts. Hong Xiuquan etait un visionnaire, ne dans une famille Hakka, un immigrant de l'interieur, avec qui on ne fraye pas. Il a frequente la mission protestante du Guangxi. Ayant du renoncer a une carriere mandarinale, desireux de faire de grandes choses, il cherche a etablir un Royaume de Justice et de Paix. La Paix avec une majuscule, c'est, en chinois, Taiping. Un pareil Royaume ne vient que par la volonte et la protection du Ciel. C'est, en chinois, Tianguo. D'ou l'appellation du reve de Hong Xiuquan : le Taiping Tianguo. Les riches et les mandarins seront contraints d'abandonner au peuple qui les cultivent les terres dont ils sont, eux, les proprietaires. Tout sera mis en commun : on repartira la pauvrete. Le desinteressement et l'austerite, qui sont une necessite, se tourneront, en raison de la generosite des pauvres, en enthousiasme revolutionnaire. C'est bien ce que l'on vit. Fanatisees par Hong Xiuquan, les hordes paysannes armees s'emparent du Sud. Elles sont devant Nankin en mars 1853, qu'elles occupent et prennent pour capitale. Remontant vers le Nord et Pekin (Beijing), elles atteignent Tianjin (Tientsin) a trois jours de marche de la capitale du Nord. Le manque d'approvisionnement et le froid sauvent la Cour terrorisee, terree dans le Palais. Les Taiping faiblissent a leur tour, les provinces s'organisent en autodefense. Zeng Guofan, general, lettre de grand renom, releve les courages et sauve la dynastie. Les Occidentaux, menaces dans leurs vies, leurs biens et leurs interets, font cause commune avec les Imperiaux. Le general Gordon s'illustre dans cette occasion. Les Occidentaux petit a petit controlent les affaires internes chinoises, comme dans un pays conquis, alors que les Chinois esperent bien reprendre, peu a peu, les concessions que leur faiblesse leur a fait consentir par le traite de Nankin de 1842. L'opium entre toujours et en quantite accrue. Les autorites sont impuissantes et la corruption progresse. Les incidents se multiplient. Anglais et Francais montent une expedition commune. Canton (Guangzhou) , puis Tientsin sont occupes. Ils reussissent la ou Hong Xiuquan et ses gens avaient echoue. C'est le sac du Palais d'ete, le Yuanmingyuan. Palais de style baroque, dessine par les jesuites, construit sous Kangxi, a ne pas confondre avec le (Nouveau) Palais d'ete, eleve non loin, le Wanshoushan. Le traite signe a Nankin etait un echec grave, mais la Convention signee a Pekin (Beijing) etait une catastrophe. La Chine, cette fois, s'ouvrait: onze nouveaux ports etaient onze nouveaux acces pour les commercants d'Europe, pour les ambassadeurs ou agents consulaires qui y resideraient en permanence, pour les missionnaires. Mieux meme , la Chine creait un ministre des Relations exterieures (Waijiaobu). Il traiterait d'une maniere officielle avec les Puissances.

Les Boxeurs: Du 10 juin au 21 septembre 1898, ce fut une periode des Cent Jours ou des Cent Fleurs comme on voudra. L'Imperatrice douairiere, plus souveraine que jamais, reagit violemment. Toutes les Reformes sont abrogees, le Marechal Yuan Shikai arrete les reformateurs les plus en vue et en execute quelques-uns. Le pays etait parcouru par des bandes armees qui se donnaient le beau nom de Force (poing) de Justice et de Concorde. Ils sont passes dans l'histoire europeenne avec le nom de Boxeurs et rappellent les Taiping. Sont-ils simplement xenophobes, sont-ils antimandchous ou simplement des fanatiques, disponibles pour quelque grande entreprise? La Cour paie et arme ces bras de justice, les lance contre les etrangers et les chretiens chinois. En juin 1900, ils font une attaque generale sur Tientsin (Tianjin), Pekin (Beijing) et a travers tout le pays. Les legations etrangeres, qui occupaient une section au sud de la Ville tartare, sont assiegees durant 65 jours. Une expedition internationale les secourt. La Cour s'enfuit de Pekin (Beijing), elle n'y revient qu'en 1902. La Chine est livree aux puissances etrangeres. La jeunesse chinoise a vu l'errance de la Cour et le Triomphe insolent des Europeens sur les Boxeurs. Elle se tourne vers l'Occident en copie les modes. C'en etaient fini du long cycle des dynasties.

Les debuts de la Republique: (1911 - 1949)

Le gouvernernent republicain provisoire: fut proclame le 10 octobre 1911 (une date toujours celebree a Taiwan sous le nom de "Double Dix"), par Sun Yat-sen et Li Yuanhong, un chef militaire de Wuchang. N'ayant pas le pouvoir de contraindre les Mandchous a abdiquer, les republicains n'eurent pas d'autre choix que d'appeler a l'aide Yuan Shikai, le chef de l'armee imperiale que les Mandchous avaient precisement rappele pour reprimer l'insurrection republicaine. Cette preference couta cher aux republicains. Yuan Shikai prit la tete du mouvement republicain et obligea Sun Yat-sen a demissionner. Yuan Shikai fit rapidement dissoudre le gouvernement republicain et proclamer une nouvelle constitution qui l'instituait president a vie. Devant l'opposition des provinces, il retablit tout naturellement la monarchie en 1915 et s'octroya le titre d'empereur de Chine. Le Yunnan fit secession entrainant avec lui le Guangxi, le Guizhou et une grande partie du Sud. Des forces furent envoyees pour ramener les provinces rebelles dans la sphere de l'empire, et c'est dans ce climat trouble que Yuan Shikai mourut. Suivit la periode des Warlords, seigneurs de la guerre, pendant laquelle, aucun pouvoir ne fut assez fort pour maintenir le pays uni jusqu'a la creation par les communistes de la Republique Populaire de Chine en 1949.

La revolution intellectuelle: Les intellectuels chinois avaient compris l'inadaptation du vieil ordre confucianiste et recherche le moyen de faire entrer la Chine dans le XXe siecle, avant meme les premiers contacts avec l'Occident. Au debut des annees 1900, le sentiment d'avoir manque des occasions avec l'effondrement du gouvernement republicain et l'amorce d'une nouvelle periode de decadence sociale renforcerent leurs inquietudes. Les intellectuels et les etudiants eprouvaient aussi un fort sentiment national qui s'etait lentement developpe pendant les dernieres annees de la dynastie des Qing. L'universite de Pekin (Beijing) devint un foyer de dissidents, attirant des intellectuels de toute la Chine (meme Mao etait present en tant qu'aide-bibliothecaire). Ils critiquaient impitoyablement la societe chinoise traditionnelle. Certains s'interesserent a un darwinisme social, tandis que le Manifeste du parti communiste etait traduit en chinois et devint le texte de base de nombreux groupes de discussion. D'autres privilegierent l'anarchisme et tous suivaient avec le plus vif interet les evenements qui se deroulaient en Russie, les revolutionnaires avaient pris le pouvoir. Le catalyseur de ce que l'on appela le Mouvement du 4 mai fut le traite de Versailles qui octroyait au Japon les anciens droits de l'Allemagne vaincue sur le Shandong. Il en resulta une immense vague de protestations et le 4 mai 1919 les etudiants descendirent dans la rue pour manifester contre cet outrage fait a leur nation et pour exiger la modernisation du pays. Des greves massives soutinrent l'action des etudiants. L'agitation fut reprimee et nombre de meneurs emprisonnes mais le Mouvement du 4 mai marqua un tournant dans l'histoire de la Chine contemporaine. On peut etablir un parallele entre les manifestations de la place Tian'anmen en 1989 et celles de 1919. En 1989, les etudiants portaient des pancartes sur lesquelles etaient inscrits "M. Science" et "M. Democratie" qui reprenaient les slogans de 1919.

Le Guomindang: A la mort de Sun Yatsen , en 1925, demeurent face a face, Chiang Kai-Chek (Jiang Jieshi), qui se presente comme le disciple du "pere de la patrie", et les chefs du parti communiste qui revendiquent l'heritage revolutionnaire. Chiang Kai-Chek, un militaire originaire de la region de Ningbo, est le mieux place pour la sucession de Sun Yatsen qui lui avait remis la direction de l'academie militaire de Whampoa (prononc. locale de Huangpu) ou Zhou Enlai etait commissaire politique. C'est une illustration, parmi d'autres, du mariage force des chefs communistes avec les instances du Guomindang. Un parti revolutionnaire grandit mieux a l'interieur d'un autre parti qu'en opposition ouverte avec lui. Des 1924, le Guomindang, inquiet de la penetration dont il est l'objet, purge le parti de ses membres communistes actifs, tout en maintenant la collaboration de fait qui soutient toutes les actions revolutionnaires deja rappelees. Quelle est la part du Komintern dans cette agitation? Elle est grande. l'internationalisme en Chine n'est pas a mettre au seul compte des puissances, il est aussi une politique decidee a Moscou et plus ou moins bien recue et executee en Chine. L'autonomie et du Guomindang et du Gongehandang, par rapport a la Russie des Soviets, est une question difficile. Pour une part, et du point de vue du Guomindang, elle explique la rupture definitive de la collaboration des deux partis. Elle explique aussi qu'un chef communiste qui monte, Mao Zedong (1893-1976), se persuade que l'obeissance aux directives ouvrieristes du camarade Borodine, representant du Komintern, est une erreur. Le module sovietique - la conquete du pouvoir par l'agitation dans les villes, ou le proletariat ouvrier est bien represente - n'est pas adapte a la Chine. Ce sont les revoltes paysannes et les soulevements populaires dont les bases sont les campagnes qui, historiquement, sont la voie chinoise du changement. Les communistes meurtris, dans les villes, qu'on se souvienne de la terrible purge antisyndicaliste et anticommuniste a Shanghai (12 mai 1927), se fortifient dans les campagnes et gardent un moment la preponderance dans le gouvernement a Wuhan, sur le Yangzi. Mao Zedong triomphe lentement. La vedette, incontestablement, appartient a Jiang Jieshi, nomme commandant en chef de l'Expedition du Nord. Il longe le Yangzi et se dirige vers la metropole commerciale Shanghai. Terrorises par les nouvelles recues des villes sur le fleuve, ou viennent de passer les troupes revolutionnaires, les notables, les marchands et les representations etrangeres preferent payer que resister a une vague qui pourrait tout emporter. La ville s'ouvre. On lit dans les histoires de la periode ce que Malraux decrit dans La Condition humaine: la liquidation systematique a Shanghai, mais aussi a Nankin, a Canton et un peu plus tard dans les autres capitales provinciales, des chefs communistes et syndicalistes procommunistes. l'option paysanne de Mao Zedong est la seule issue raisonnable, apres ce qui vient de se passer. Jiang Jieshi, qui se fie trop aux concours de la grande bourgeoisie nationaliste et des milieux financiers, epouse une fine Song, Meiling et, par son mariage, devient le beau-frere de la veuve de Sun Yatsen... Il prend la tete de la faction revolutionnaire moderee du Guomindang. Desormais quand on parlera des Nationalistes, on entendra le Guomindang et ses troupes rangees derriere Jiang Jieshi. L'Expedition vers le Nord entre sans difficulte a Pekin (Beijing), le 5 juin 1928. Il faut maintenant rallier, par la force, par l'argent ou par les honneurs, les seigneurs de la guerre, surveiller l'activite communiste forte mais insaisissable, dans le Sud, et s'attaquer aux situations et aux privileges d'Occidentaux, dont on a tout de meme besoin. Ce n'est pas impossible. Il est de l'interet de la France, de l'Angleterre et des Etats-Unis, s'ils veulent commencer en Chine, de favoriser l'installation d'un pouvoir autoritaire, selon la doctrine de Sun Yatsen. Moderniser la Chine est un programme ambitieux. Sa realisation suppose la paix sociale, la treve politique, la surveillance de l'URSS et un refoulement impitoyable du Japon, dont le militarisme monte en Orient, a la maniere dont fascisme et nazisme montent en Italie et en Allemagne.

La Lonque Marche: Entre 1927 et 1930, des soulevements dans les villes de Nanchang, Changsha, Canton (Guangzhou), sous l'instigation des communistes, echouent. La ligne Mao Zedong se trouve renforcee a partir de 1928, sont creees des bases rurales. Leur population est administree par des soviets. Elle est formee a la guerre de guerilla. L'Armee rouge en est issue. La reunion des territoires ainsi organises donne naissance, en 1931, a la base du Jiangxi. Contre cette base seront menees six campagnes d'aneantissement, interrompues deux fois par les incursions japonaises de 1931 et de 1933, a l'autre bout du pays, dans le Nord-Est. Le commandement de la base du Jiangxi juge la position intenable et, le 16 octobre 1934, les cent mille hommes de l'Armee rouge , la population la plus compromise avec le soviet de la base et diverses formations auxiliaires, levent le camp. Dix mille kilometres - mais qui les comptera? - d'une migration dans les zones semi-desertiques ou tout a fait inhospitalieres de l'Ouest et du Nord-Ouest sont parcourus, dans des conditions effroyables, au milieu des dangers et des souffrances qui permettront de faire de la " longue Marche" une epopee. Elle est un episode des plus reussis de l'opera l'Orient Rouge. On s'arrete au Shanxi. Yan'an devient la capitale d'une nouvelle base. De la, partiront les offensives politiques, culturelles et militaires, en direction soit de Jiang Jieshi et du Guomindang, soit des Japonais, quand les affrontements, qui annoncent la guerre, auront fait place a la realite de l'invasion.

L'Invasion japonaise: En septembre 1931, les Japonais profiterent du desordre qui regnait en Chine pour envahir la Mandchourie. Ils instaurerent un Etat fantoche symboliquement preside par le dernier empereur chinois, Puyi. Toutefois obsede par la menace communiste, Tchang Kai-chek poursuivait ses campagnes de lutte contre les communistes, appliquant le slogan "D'abord la pacification ensuite la resistance". les plans des communistes etaient d'une autre nature. A la fin de 1936, A Xi'an, ils convainquirent les generaux de Tchang de le faire prisonnier et de former une union sacree contre le Japon, apres diverses negociations avec Zhou Enlai. Cette alliance n'arreta pas les Japonais qui, en 1937, declencherent une gigantesque invasion. En 1939, ils occupaient l'Est de la Chine, obligeant le Guomindanga se replier a l'Ouest, vers Chongqing. En 1941, l'attaque des Japonais contre Pearl Harbor decida l'Amerique a entrer en guerre. Esperant que les troupes chinoises mettraient un frein a l'avancee nipponne, les Americains se rendirent compte que Tchang Kai-chek cherchait a.eviter le conflit pour epargner ses troupes et reprendre les attaques contre les communistes une fois que les Etats-Unis auraient defait le Japon.

En 1941, l'alliance entre le Guomindang et les communistes fut rompue et, a la fin de la Seconde Guerre mondiale, la Chine etait le theatre d'une guerre civile. L'armee communiste, qui comptait 900 000 hommes, etait soutenue par des milices et plusieurs millions de partisans. Avec la capitulation du Japon, en 1945, une terrible lutte de pouvoir s'engagea entre le Guomindang et les forces communistes rassemblees en Mandchourie. En 1948, les forces communistes etaient aussi puissantes que celles du Guomindang. Les trois grandes batailles de 1948 et 1949 precipiterent la defaite du Guomindang et des centaines de milliers de soldats de l'armee nationaliste se rallierent aux communistes, Ces derniers firent mouvement vers le sud et traverserent le Yangzi. En octobre, ils s'etaient rendus maitres de toutes les grandes villes de Chine meridionale. A Pekin (Beijing), le 1er octobre 1949 Mao Zedong proclama la naissance de la Republique Populaire de Chine (Zonghua Renmin Gongheguo, en chinois) Tchang Kai-chek se refugia sur l'ile de Formose (aujourd'hui Taiwan) emportant avec lui toutes les reserves alors du pays et ce qu'il subsistait de ses forces aeriennes et navales. Quelque deux millions de refugies et de soldats du continent affluerent sur l'ile. Le president Truman ordonna alors l'instauration d'un blocus naval autour de l'ile pour proteger ses habitants contre toute attaque du continent.

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La Republique Populaire de Chine - Partie I - (1949 - 1966)

Tchang Kai-chek s'etait enfui avec les reserves d'or et l'economie etait en plein chaos. Les infrastructures etaient detruites et les productions industrielles et agricoles avaient considerablement chute. Avec la prise du pouvoir par les communistes, la Chine prit un nouveau visage. Unis par la victoire, rendus plus solidaires encore par la guerre de Coree et la necessite de defendre le nouveau regime contre une possible invasion americaine, les communistes firent des annees 50 une periode dynamique. En 1953, l'inflation etait enrayee, la production industrielle avait retrouve son niveau d'avant-guerre, et les terres confisquees aux proprietaires fonciers avaient ete redistributes aux paysans. S'inspirant des premiers modeles sovietiques, les Chinois se lancerent dans un plan quinquennal gigantesque qui reussit a redresser l'economie. Simultanement, le Parti renforca son controle en repartissant la population en unites de travail (danwei) et en divisant le pays en 21 provinces, 5 regions autonomes, 2 municipalites (Pekin (Beijing) et Shanghai) et quelque 2 200 districts exercant leur juridiction sur environ un million de sous-branches du Parti.

La periode des Cent Fleurs (1956 - 1957): De gigantesques problemes subsitaient dans le domaine social, en particulier dans les relations avec les intellectuels. Bon nombre d'entre eux, favorables au Guomindang, etaient restes sur le continent plutot que de fuir a Taiwan. Par ailleurs, de nombreux Chinois d'outre-mer, souvent hautement qualifies, etaient revenus dans leur pays apres la Liberation pour participer a l'enorme tache de reconstruction. Ces emigres et ceux qui avaient des antecedents suspects devaient suivre des cours intensifs de "reeducation" dans des universites specialisees et etaient contraints d'ecrire leur autocritique avant d'obtenir leur diplomes. Pour beaucoup, ce fut une experience traumatisante. les ecrivains, artistes et cineastes faisaient l'objet de controles ideologiques stricts inspires des ecrits de Mao sur l'art durant la periode Yan'an. Une crise eclata lorsque l'ecrivain Hu Feng, profitant d'un assouplissement de ces memes controles au debut du premier plan quinquennal, stigmatisa les pardigmes marxistes pour apprecier un travail creatif. On l'accusa d'etre a la solde du Guomindang. Une chasse aux sorcieres dans les milieux artistiques s'ensuivit, visant a denoncer le "Hu Fengisme". Dans les plus hautes instances du parti, les opinions etaient divisees. Mao, Zhou Enlai et d'autres membres influents estimaient que le travail du parti avait ete suffisamment positif pour supporter sans dommage quelques critiques et, lors d'une seance a huis clos, Mao lanca l'idee de "laisser cent fleurs s'epanouir" dans les arts et "cent ecoles de pensee rivaliser" dans les sciences. Les idees de Mao furent officiellement approuvees un an plus tard en avril 1957. Les intellectuels reagirent avec enthousiasme. Leurs critques touchaient tous les domaines, de la corruption au sein du Parti au controle de l'expression artistique, de l'absence de la litterature etrangere a la faiblesse du niveau de vie. Elles portaient egalement sur le monopole du pouvoir detenu par le PCC et les abus qui en resultaient. le parti modifia rapidement son attitude: en l'espace de six mois, quelque 300 000 intelluctuels furent accuses de "droitisme", destitues de leurs fonctions et, dans bien des cas, incarceres ou envoyes dans des camps de travail.

Le Grand Bond en avant (1958 - 1959): Le 1er plan quiquennal avait donne des resultats satisfaisants sur le plan industriel mais la croissance de la production agricole, avec 3,8% seulement, s'etait revelee tres decevante. Une fois de plus, les dirigeants du parti etaient divises sur les mesures a prendre. Certains, comme Zhou Enlai, etaient favorables a un systeme de prime a l'agriculture. D'autres, comme Mao, estimaient qu'une mobilisation massive et des appels a l'enthousiasme populaire suffiraient pour que l'economie chinoise rejoigne, en une nuit , le niveau des pays industrialises. Finalement, Mao l'emporta et les Chinois se lancerent dans un programme radical de mise en place de communautes agricoles. On invita la population a participer a de gigantesques projets d'irrigation et de controle de l'eau. Pour Mao, le zele revolutionnaire et l'effort cooperatif des masses devaient pouvoir surmonter tous les obstacles et transformer la Chine en un paradis productif. Mao encouragea l'essor des petites industries a l'echelle des communes, dont les benefices serviraient au developpement de l'agriculture, plutot que l'industrie lourde. Une mauvaise gestion et un manque de motivation contribuerent a l'effondrement de la production agricole et a la desorganisation du secteur industriel. Qui plus est, les inondations et la secheresse en 1959 et en1960 ainsi que l'arret brutal de toute aide sovietique en 1960 aggraverent la situation. Mao joua un role non negligeable dans l'echec du bond en avant et dans la rupture avec l'Union sovietique. Mao voyait d'un mauvais oeil la coexistence pacifique entre l'Union sovietique et les Etats-Unis, le discours de Kroutchev sur la destalinisation et le revisionnisme croissant des dirigeants sovietiques. Ces dissensions connurent leur acme lorsque Kroutchev denonca sa promesse de fournir a la Chine un prototype de bombe atomique et prit parti pour l'Inde lors d'un incident frontalier sino-indien. En 1960, les Sovietiques rapatrierent leur 1390 experts qui travaillaient en Chine, en tirant ainsi un trait sur les quelque 600 projets communs, notamment celui de la bombe atomique.

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La Republique Populaire de Chine - Partie II - (1966 -1980)

La revolution culturelle (1966 - 1969): A lire ce qui s'ecrit sur la Revolution culturelle en Chine, on est frappe par ce qu'elle eut d'indiscernable. Sa puissance etonne et seduit, son deferlement innombrable defie toute estimation; toute analyse se perd dans un insaisisable et prodigieux spectacle. Grand Opera revolutionnaire, tout ce qui s'y fait s'y joue, tout ce qui s'y dit s'y declame et s'y chante. Il faut certainement y voir, a la maniere dont temoigne l'histoire traditionnelle de la Chine, un foudroyant retour au pouvoir de Mao Zedong, utilise a son tour par un homme plus jeune, Lin Bao, autour du pivot de la revolution qu'etait Zhou Enlai depuis 1949. Il faut y voir, indiscernablement melees, les solutions personnelles trouvees par Mao Zedong, Lin Biao et Zhou Enlai, qui apparaissent et sont exploitees, sur le plan ideologique, comme le triomphe de la pensee de Mao, la punition du traitre prosovietique Liu Shaoqi, en attendant l'exit tragique de Lin Biao, la reevaluation du role joue par Mao Zedong, la montee derriere Zhou Enlai de Deng Xiaoping... Meme lorsqu'un Mao Zedong ou un Staline imposent un lourd pouvoir personnel, ils ne le font qu'avec le consentement, plus ou moins bienveillant, des autres camarades et c'est d'ailleurs ce qui explique, sanglantes ou fleuries, les purges necessaires, de temps a autre, pour que le Comite central continue sans trop grincer a chanter la vertu et la sagesse du Prince. Un beau jour le Comite central, qui regroupe des factions opposees, ne veut plus maintenir son soutien. Il a suffi des erreurs lourdes de consequences du Grand Bond en avant et des communes populaires (1958), du retrait brutal de l'assistance sovietique en Chine (1960). Les "Mao Papers" ont revele que, malgre les apparences que pouvait entretenir le culte de Mao Zedong, sa position avait ete reellement compromise et qu'en opposition a son idealisme ideologique, la tendance economiste et prosovietique gagnait du terrain : la conjonction du groupe Liu Shaoqi et de certaines parties de l'Armee menaga progressivement la position personnelle de Mao Zedong. Les difficultes ont commence a Pekin (Beijing) et le salut lui est venu de Shanghai. La mise en minorite de Mao Zedong a Pekin, dans sa capitale, est un fait. Les choses s'expliquent par la reaction politique qu'un succes militaire important provoque immediaternent dans un pays ou l'Armee est a la fois la garante du regime et la force qui peut soit le renverser, soit y operer de nouvelles repartitions des postes de commandement. Pekin a subitement lache Mao Zedong, quand le Comite de Pekin a trouve un grand homme aussi grand que lui : le marechal Peng Dehuai, vainqueur de la Guerre de Coree. On peut certes s'etonner que les Chinois aient considere l'arret des hostilites comme une victoire. Pour la premiere fois dans l'histoire, une armee chinoise, apres des pertes enormes, il est vrai, mais rapidement reparees, a impose aux Americains, entres eux-memes dans le concept de la guerre limitee, l'obligation de s'ecarter de la frontiere chinoise et d'admettre le renforcement d'un pouvoir communiste a Pyong Yang. Quoiqu'on puisse ou veuille en penser, sur le plan militaire, et sur le plan politique, l'operation menee par les Chinois etait un succes de prestige retentissant. Un regime, qui se maintient autant par le conditionnoment generalise des populations que par des meritoires amenagements politiques et economiques dans la nation, a besoin de tels succes. Le commandant en chef des troupes chinoises en Coree a donc pu tres legitimement voir croitre ses chances de prendre place dans la vie politique et montrer que la gloire militaire ne lui suffisait pas... Parallelement, les murs de l'universite de Pekin furent couverts d'affiches qui en critiquaient l'administration. Mao approuva. Peu apres, les etudiants recurent des brassards rouges et descendirent dans la rue. Les Gardes rouges (hongweibing) etaient nes. Des aout 1966, Mao passait en revue les milliers de Gardes rouges qui defilaient en chantant et en brandissant le Petit Livre rouge. Les Gardes rouges en vinrent a des extremites. On ferma les universites et les ecoles secondaires. Intellectuels, ecrivains et artistes furent renvoyes, tues, persecutes ou contraints au travail force dans les campagnes. La publication des periodiques litteraires et culturels fut interrompue, les temples pilles, les communautes rnonastiques dispersees et de nombreux vestiges du passe "feodal", "exploiteur" ou "capitaliste" (dont des temples, des monuments et des oeuvres d'art), furent detruits. A la fin de janvier 1967, l'ALP avait recu l'ordre de dispenser toutes les "organisations contre-revolutionnaires", autrement dit les groupes dont les interets etaient contraires aux siens. Les affrontements qui s'ensuivirent se solderent par des milliers de victimes, notamment dans le Sichuan et a Wuhan, ou l'ALP s'attaqua a une coalition de 400 000 Gardes rouges et comites ouvriers. Les combats se poursuivirent tout au long de septembre 1967. Mao et Jiang Qing (sa femme) finirent par admettre qu'il fallait y mettre un terme. Les "tendances ultra-gauchistes" furent condamnees et l'ALP fut consacree seul representant de la "dictature du proletariat". La Revolution culturelle prit un tour nouveau lorsque le pouvoir echappa aux Gardes rouges et que l'armee mit en place un regime de terreur. Une campagne de purification fut organisee sous l'egide de groupes de propagande de la pensee de Mao. Tous ceux qui avaient un passe juge "suspect" subirent une "reeducation" dans des ecoles ou aux champs. Ils etaient contraints de se livrer a l'etude intensive, l'autocritique et aux travaux manuels.

Mao accuse: A la reunion du Comite Central de Hankou, Mao Zedong, accuse d'avoir ruine la Chine et de l'avoir isolee, fit sa confession et, ayant reconnu ses "erreurs", demissionna. C'est alors que le monde entier commenca a parler de Liu Shaoqi, qui devint President de la Republique. Mao Zedong quitta Pekin (Beijing). La capitale se remplit progressivement d'agents a la devotion du nouveau President. Mao se rendit sur le Yangzi et resida a Hangzhou, capitale du Zhejiang, au sud de Shanghai, laissant a Peng Dehuai, Liu Shaoqi et Peng Zhen, le maire de Pekin, la realite du pouvoir. L'image de marque du president Mao Zedong poursuivait sa carriere prodigieuse. On laisse toute sa gloire a Mao Zedong, dans le moment meme ou le pouvoir effectif lui est retire. C'est la prudence meme... Apres avoir longuement hesite, le phenomene gigantesque de la Revolution culturelle prit progressivement l'aspect d'un retour de Mao Zedong au pouvoir et la victoire du Vieux Chef apparut eclatante dans la deconfiture irremediable de Liu Shaoqi. Aupres de Mao Zedong, la deuxieme place etait dedoublee. Zhou Enlai, eternellement souriant, apres avoir joue un role considerable d'arbitrage entre les factions rivales de l'armee, apparaissait au cote de son vieux compagnon et demeurait le Premier ministre. Il avait eu ce merite d'assurer la vie materielle tandis que le conflit ideologique et l'affrontement personnel se dechainaient, menacant de causer au pays un tort irremediable et de le plonger dans une guerre civile entre communistes, tous aussi bon teint les uns que les autres. Sautillant, le Petit Livre Rouge en main, escortant a la tribune la noble figure de Mao Zedong, on pouvait apercevoir, faisant pendant a Zhou Enlai, la face etroite et semillante de Lin Biao. Le retablissement du pouvoir de Mao Zedong etait en meme temps la consecration de Lin Biao, Lin Biao qui serait elimine a son tour en septembre 1971.

La mort de Mao et l'arrestation de la Bande des Quatre: Mao souffrait d'une pathologic neurologique incurable. Il mourut le 8 septembre 1976. Son successeur, Hua Guofeng, avait commence sa carriere comme chef de Parti dans le district natal de Mao et fut eleve par ce demier au rang de Premier ministre et president du Parti. Au depart, Hua ne chercha pas a s'occuper du cas de Jiang Qing et de ses trois allies, qualifies de "Bande des Quatre". Lorsqu'ils mianifesterent leur opposition a Hua, ce dernier, de concert avec le politburo, les fit arreter le 6 octobre. La nouvelle fut saluee dans toute la Chine. Leur proces se deroula en 1980. Ils durent endosser l'entiere responsabilite de la Revolution culturelle. Jiang Qing ne manifesta pas le moindre repentir, abreuva d'injures ses juges et s'en tint a la version celebre selon laquelle elle "etait le chien de Mao. Je mordais quiconque il m'ordonnait de mordre". Les Chinois comprirent la formule et on murmura en prive que le probleme ne concemait pas une Bande des Quatre, mais une "bande des Cinq". Condamnee a mort, Jiang Qing vit sa peine commuee en assignation a residence et vecut jusqu'en 1991.

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La Republique Populaire de Chine - Partie III - (1980 - 1999)

Le troisieme retour de Deng Xiaoping: Au milieu de 1977, Deng Xiaoping revint au pouvoir pour la troisieme fois et fut nomme vice-Premier ministre, vice-president du Parti et chef d'etat-major de l'armee. Il ne lui restait plus qu'a evincer Hua Guofeng. En septembre 1980, Hua abandonna son poste de Premier ministre a Zhao Ziyang, membre de longue date du PCC. Les reformes economiques qu'il avait mises en oeuvre au Sichuan au milieu des annees, 70 lui avaient permis de redresser l'economie de la province et lui avaient valu l'estime de Deng. En juin 1981, Hu Yaobang, un protege de Deng, remplaca Hua a la presidence du Parti. En definitive, le pouvoir passa aux mains d'une direction collegiale de six membres du Comite permanent du PCC, parmi lesquels, Deng, Hu et Zhao. Le pays souffrait de mille maux. Il etait imperieux de moderniser les structures, d'insuffler un sang neuf parmi les dirigeants, de prevenir tout risque de retour en force des gauchistes et de legitimer un regime qui s'appuyait sur la force de l'armee et de la police.

La resolution de la crise "theologique": Deng pouvait juguler la menace des gauchistes en les maintenant sous les verrous. La difficulte majeure tenait en ces mots : que faire de Mao ? Deng avait en effet l'intention de desacraliser l'image de Mao, en sachant que la methode utilisee par Khrouchtchev pour denoncer Staline n'etait pas transposable en Chine car Mao avait trop de fideles au sein du Parti et jouissait d'un trop grand respect au sein de la population. Il fallait trouver un compromis. Il prit la forme d'une resolution emanant du Comite central du Parti en, 1981 qui citait Mao comme un grand marxiste, un fin stratege et un theoricien de la revolution proletarienne: "Il est vrai qu' il a commis de grosses erreurs durant la Revolution culturelle mais, si l'on considere l'ensemble de ses actes, ses contributions a la Revolution depassent de beaucoup ses erreurs." Elle n'en accusait pas moins Mao, en revanche, d'avoir commandite la Revolution culturelle, "responsable des plus graves echees et des plus lourdes pertes subis par le Parti, l'Etat et la population depuis la fondation du PCC".

L'economie au premier plan: Sous Deng, la Chine connut une serie de reformes visant la reconstruction economique. Dans les campagnes, on appliqua le "systeme de responsabilites" qui permettait aux familles et aux entreprises, une fois remplis leurs quotas, de vendre leurs surplus au marche libre. Sur la cote, des Zones economiques speciales (ZES) furent etablies a Zhuhai (pres de Macao), a Shenzhen (pres de Hong Kong), a Shantou et a Xiamen (en face de Taiwan). Les resultats furent spectaculaires: au cours des quinze dernieres annees, la Chine a atteint une croissance annuelle de 9%. les reformes economiques ne s'accompagnerent que de maigres changements politiques. En realite, elles peuvent etre comprises comme un compromis; plus d'ouverture economique contre un renforcement du pouvoir politique du Parti. Ce dernier controle toutes les facettes de la vie publique. A l'autocratie communiste et a la corruption qu'elle suscite vient s'ajouter le spectre de l'inflation, de l'ordre de 20 a 30% au cours des cinq dernieres annees. Ces conditions sociales et economiques ont conduit aux tragiques evenements de Pekin (Beijing) en 1989.

Le massacre de Pekin: Le catalyseur des manifestations de 1989 fut la mort de Hu Yaobang, un reformateur et un protege de Deng contraint de demissionner par l'aile dure du Parti au debut de 1987. Le 22 avril 1989, une semaine apres la mort de Hu, les dirigeants de la Chine se rassemblerent dans le palais de l'Assemblee du peuple pour lui rendre un hommage officiel. A l'exterieur, environ 150 000 etudiants et autres militants avaient organise leur propre ceremonie qui degenera bientot en une manifestation massive en faveur de la democratie. Pendant tout le mois d'avril, les etudiants affluerent pour se regrouper sur la place Tian'anmen et, a la mi-mai, on comptait pres d'un million de manifestants. Des ouvriers et meme des policiers s'etaient joints a eux. Des manifestations furent organisees dans au moins une vingtaine d'autres villes. Quelque 3 000 etudiants entamerent une greve de la faim sur la place au nom de la democratie. Les employes de chemin de fer laisserent les etudiants desireux de se rendre a Pekin (Beijing) circuler gratuitement dans les trains. Des eleves de l'Institut d'art de Pekin edifierent une statue sur la place Tian'anmen, la "deesse de la Democratie", ressemblant a la statue de la Liberte a New York. Les etudiants reclamaient la liberte, de la presse, la fin de la corruption et du nepotisme. D'immenses manifestations de soutien eurent lieu a Hong Kong, Macao et Taiwan. Avec l'arrivee de la presse etrangere, le "printemps de Pekin" devint l'evenement mediatique de l'annee 1989. Pendant une partie du mois de mai, le PCC ne parvint pas a etouffer les manifestations, et la venue proche de Mikhail Gorbatchev, a l'occasion du premier sommet sino-sovietique depuis 1959, empechait tout recours a la force. Neanmoins, la loi martiale fut instauree le 20 mai, juste apres le depart de Gorbatchev et, le 2 juin, quelque 350 000 soldats se deployerent autour de Pekin (Beijing). Aux premieres heures du 4 juin, la 27e division de l'armee attaqua. Des chars et blindes foncerent sur les barricades, ecrasant quiconque se trouvait sur leur passage, tandis que les soldats mitraillaient de leurs armes automatiques les foules massees dans les rues. Des temoins oculaires font etat de centaines de tues rien que sur la place, sans compter des milliers de morts et de blesses dans les environs et les faubourgs. Les troupes refuserent de laisser les medecins soigner leurs patients et l'on a evoque l'existence de charniers. On ne saura probablement jamais la verite. En tout cas, le Parti a perdu le peu d'autorite morale qui lui restait et devra un jour rendre des comptes.

Hong Kong: En vertu d'un accord sino-britannique conclu en 1984, Hong Kong est redevenu chinoise en 1997. Le traite "inegal" de Nankin (1840), impose par la Grande-Bretagne a la Chine lors de la guerre de l'Opium, avait cede Hong Kong aux Britanniques "a perpetuite". En revanche, les Nouveaux Territoires attenant a Kowloon (neuf dragons) avaient ete "loues" aux Anglais pour 99 ans, en 1898. Les Britanniques ont accepte de retroceder la colonie en bloc a la Chine a l'expiration du bail. La passation des pouvoirs s'est effectue sans heurs. Aux termes de l'accord de 1984, le passage de Hong Kong sous la domination chinoise s'est fait selon le principe "un pays, deux systemes". L'application et l'administration de ce "systeme" sont detaillees dans la Loi fondamentale, qui promet a l'ancienne colonie un "haut degre d'autonomie". Les limites de cette "autonomie" ont fait l'objet d'apres discussions entre la Grande-Bretagne et la Chine.

Macao: Les galions portugais debarquerent a Macao au debut du XVIeme siecle et, en 1557, en guise de remerciement pour le massacre d'une poignee de pirates, la Chine ceda au portugal la petite enclave. Pendant plusieurs siecles, Macao constitua la plaque tournante du commerce avec la Chine. Au XIXeme siecle, les negociants europeens et americains ne pouvaient faire du commerce a Canton (Guangzhou) que durant la saison commerciale. En dehors de celle-ci, ils se repliaient sur Macao. Lorsque la guerre de l'Opuim eclata entre les Britanniques et les Chinois, les Portugais se tinrent diplomatiquement a l'ecart et Macao se retrouva bientot le parent pauvre de Hong Kong, enclave nettement plus dynamique. La prosperite dont jouit aujourd'hui Macao est decuplee par la folie du jeu: chaque week-end, des flots de joueurs venus de Hong Kong se precipitent dans les casinos. La prostitution represente elle aussi une source non negligeable de revenus, bien que les autorites ne l'admettent pas officiellement. Une fois la retrocession de Hong Kong signee avec les Britanniques, il etait inevitable que la Chine cherche a recuperer Macao. Un accord fut enfin signe avec le Portugal en 1978: a partir du 20 decembre 1999 ce sera au tour de Macao de redevenir chinoise. Sous les memes conditions que pour Hong Kong, elle restera une Zone d'administration speciale pendant cinquante ans sous controle chinois avant de reintegrer pleinement la mere patrie. Les chinois de Macao semblent cependant accepter leur destin avec plus de philosophie que les Hongkongais. la Chine a donne a Macao des garanties que Hong Kong n'a pas reussi a obtenir, comme la promesse qu'aucune troupe de l'armee populaire ne sera basee a Macao et que la declaration des droits de l'homme sera inscrite dans la Basic Law (loi fondamentale) future de Macao. Par contre, tous les Portugais ont deja commence a fermer leurs bureaux d'administration avant la retrocession pour rentrer en Europe avant la fin du millenaire....

Taiwan: La population de Taiwan a suivit d'un oeil tres attentif l'evolution de la situation a Hong Kong. Le regime nationaliste de Tchang Kai-chek s'est enfui a Taiwan en 1949, apres la prise du pouvoir par les communistes. Depuis, il a prospere et s'est democratise au cours des dernieres annees. Il est probablement le plus democratique des "quatre petits Tigres" (ou "Dragons" comme les Chinois les appellent). Cette reussite ne doit pas occulter les difficiles relations entre les communistes et le Guomindang. Le probleme est simple. Les nationalistes (Guomindang) ont occupe Taiwan sans jamais cesser d'affirmer leur droit de gouverner la Chine entiere. Les communistes, de leur cote, maintiennent que Taiwan est une province dependant du continent. La plupart des Taiwanais doutent de la sincerite de la Chine et de son credo : "un pays, deux systemes". lls s'interrogent sur la possibilite de preserver leurs libertes alors que la Chine continentale a oppose tant d'objections aux droits democratiques elementaires reclames par Hong Kong. La Chine, par ailleurs, continue de revendiquer ses droits sur Taiwan. Tandis que Taiwan s'efforce d'obtenir une reconnaissance internationale, malgre le veto chinois aux Nations unies, il semble qu'une invasion soit le seul moyen dont dispose le regime chinois pour "convaincre" les Taiwanais que la reunification est dans leur "interet". Lors des derniers tremblements de terre qui ont secoue Taiwan en 1999, la Chine a propose une aide financiere mais Taiwan a immediatement refusee...

Aujourd'hui, en 1999, la Chine est gouverne par Jiang Zemin qui a effectue de nombreux voyages en Europe et aux Etats-Unis ainsi qu'en Afrique du Nord pour negocier des marches. La Chine tente deseperement depuis 13 ans d'entree dans la WTO (organisation mondiale du commerce), Les Etats - Unis ont donne leur accord lors du dernier congres de Seattle en Novembre 1999 mais elle attend toujours l'accord des autres membres...

 

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